Découvrant avec stupeur en ce début septembre, que la piscine Alfred Sevestre à Issy les Moulineaux avait été fermée cet été en pleine canicule pour des raisons de coût d’électricité m’a vraiment frappé. Cela renvoie douloureusement aux activités que certains ont choisi de classer non-essentielles il y a peu de temps, celles qui ont été les dernières à ré-ouvrir lors du premier déconfinement, et les premières que l’on sacrifie en cas d’imprévu. Combler un déficit de budget municipal en fermant un équipement utilisé pour les loisirs des habitants, l’apprentissage de la natation aux scolaire, et la pratique sportive est clairement un échec, et presque une honte, davantage encore dans une France qui se prépare aux JO 2024…
En tant que nageur régulier, je connaissais les piscines fermées pour la vidange annuelle, les fermetures pour travaux plus ou moins longs ou encore les fermetures pour grèves des uns ou des autres. Tout cela étant bien intégré dans mes habitudes de nageur citadin devant jongler entre plusieurs piscines. Mais là c’est un phénomène totalement nouveau et inquiétant.
Cela pourrait être une anecdote, statistiquement sur près de 3,000 piscines en France il se passe chaque jour certainement des choses stupéfiantes (rien qu’à voir le débat surréaliste à Grenoble sur le burkini), mais cette fois ce problème pourrait avoir davantage de conséquences. Tout d’abord on parle d’Issy les Moulineaux, donc une commune plutôt aisée de l’ouest parisien. Ensuite, et encore plus inquiétant, ce n’est pas un phénomène isolé. Le journal Ouest France rapporte en effet que l’Hippocampe de Granville géré par Vert-Marine est fermé pour une durée indéterminée depuis ce dimanche 4 septembre à cause de la hausse du prix de l’énergie. Le même concessionnaire invoque la même raison à Limoges où L’Aquapolis ne réouvrira pas ses portes cette semaine comme prévu initialement. Egalement à Roye dans la Somme, laissant sur le carreau les usagers, les clubs, et les scolaires qui devaient commencer leurs séances de piscines dès ce lundi. De très nombreuses piscines en France sont concédées à des organismes privées qui en assurent la gestion, comme Vert Marine, Carilis ou même l’UCPA. Ces organismes répondent à des appels d’offre pour remporter des contrats de délégation de service public, et gèrent eux-même les finances et le budget de la piscine, comme les salaires du personnel, ou les factures d’électricité… elles seront donc toutes confrontées tôt ou tard à la hausse vertigineuse des prix de l’énergie lors de la revue de leur contrat de fourniture d’énergie, et cela ne concernera pas que les piscines, le même problème se posant pour les remontées mécaniques et inquiète fortement les professionnels du secteur.
Le prix de l’énergie pour les professionnels a flambé en un an. De 85 € le mégawattheure (MWh) il y a un an à plus de 1000 euros aujourd’hui, et avec des échanges à plus de 1600 euros le MWh pour décembre ! La piscine Aquapolis à Limoges qui avait budgétisé 600 000 euros de frais d’électricité pour l’ensemble de l’année a déjà dépensé 1 600 000 euros à ce jour, ce qui empêche au délégataire de service public selon-lui d’assurer l’exploitation de la piscine.
La piscine Keller, gérée également par Vert Marine risque t’elle ce même genre de fermeture ? Le problème se pose aussi pour toutes les autres piscines concédées à des organismes privés tout comme celles exploitées directement par les municipalités. Certaines piscines particulièrement énergivores comme la piscine Puteaux, un bassin 50m extérieur chauffé à 28°C va t’elle résister aux hausses du coût de l’électricité ?
Les piscines ont là un défi de taille à relever. Le bon sens voudrait que l’on se tourne vers la sobriété énergétique, en réduisant de un ou deux degrés la température des piscines, ou que l’on réduise les douches. En cette période d’inflation, espérons que ce problème ne soit pas répercuté sur le coût du prix des entrées des piscines.